Boulangeries Paul : quand le service ne colle pas avec l’image

Boulangeries Paul : quand le service ne colle pas avec l’image

Paul, une oasis de gastronomie dans un monde de brutes. Le décor suranné, les plaquages de bois couleur chêne, une jolie calligraphie ; même la porte du local poubelle est peinte dans un vieux vert artificiellement patiné avec une poignée dorée que votre grand-mère n’aurait pas reniée.

Boulangeries Paul dans l'aéroport de Charleroi

Tout est là pour vous rappeler le temps où les produits avaient encore du goût. Et sans doute qu’il y a du vrai là-dedans car un peu comme un Starbucks, un « Paul » promet une nourriture plutôt goûteuse lorsqu’on se trouve dans le désert culinaire d’un aéroport comme celui de Charleroi (pardon « Bruxelles Sud » selon la terminologie Ryanair).

Seulement voilà … depuis Parasuraman et compagnie, on sait avec la certitude des études empiriques que la satisfaction est créée par le produit ET le service. Jusque-là rien de nouveau sous le soleil. Alors quand le produit est bon on s’attend à un service au moins équivalent et c’est là que le bât blesse. Scène ahurissante à l’aéroport de Charleroi. Il est 13h30 ce lundi 10 Octobre. Devant moi une cliente trépigne d’impatience. Elle a commandé son plat à réchauffer depuis longtemps et ce dernier n’arrive pas. Après une attente apparemment interminable, la cliente se plaint auprès d’un caissier que son plat, enfin servi, est froid. Rien que de très banal me direz-vous.  Sauf que cet employé, peu délicat annonce à tue-tête et plein de moquerie que la responsable est attendue par la Madame qui n’est pas contente. Deux matrones s’approchent alors de cette cliente, l’air décidé à ne pas se laisser faire. S’en suit un dialogue de sourds qui se termine lorsque les deux employées haussent les épaules, le sourire aux lèvres, et s’en retournent à leur tâches quotidiennes (j’allais dire à leur « Pain Quotidien » mais vous ne m’auriez pas pardonné ce jeu de mots facile qui m’aurait d’ailleurs causé pas mal de soucis pour la version anglaise de ce billet).

Logo de la boulangerie Paul

Mon avis :

Mauvais service, mauvaise gestion (ou plutôt absence de gestion) des réclamations, décalage total entre l’image de la marque et l’image des employés. Rien ne colle. Je pourrais m’en tenir là et vous ne seriez pas beaucoup plus avancé. Alors comment s’explique le comportement de ces employés ? C’est l’objet d’une étude empirique colossale qu’a publié le respecté professeur de marketing de l’Université de Mannheim Christian Homburg sous un titre très sexy (« See no evil, hear no evil, speak no evil: a study of defensive organizational behavior towards customer complaints ») pour un journal aussi sérieux que le Journal of the Academy of Marketing Science. Homburg y développe son idée de DOB (« Defensive Organizational Behavior ») et voit dans la résistance des employés à accepter et traiter les réclamations trois causes inhérentes à la personnalité même de l’être humain : l’isolement (la nécessité de garder une certaine distance par rapport à des évènements ou faits désagréables), le refus (d’accepter une réalité menaçante) et la projection (c’est-à-dire le reflet que renvoient les faits de ses propres – mauvais – traits et de son attitude perfectible). Souvenez-vous en la prochaine fois que vous irez chez Paul.


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